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CENTRE D'ETUDES
SUPERIEURES D'ØSTFOLD
Français des Affaires et Commerce International Renaud Soufflot de Magny |
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RECOMPOSITION |
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LA "DROLE DE VICTOIRE DE LA GAUCHE" |
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LA MEDIOCRE PERFORMANCE DES SONDAGES |
EN
CONSTRUCTION (Animation: Andy Ewans)
LA
"DROLE DE VICTOIRE" DE LA GAUCHE
(18 mars 1998)
Lors des élections du 15 mars, le premier parti de France aura été celui des abstentionnistes : 42 % des Français n’ont pas voté pour les régionales (39,5 % pour le premier tour des cantonales). Pour les précédents scrutins régionaux, en 1986 et 1992, ils n’avaient été respectivement que 22 et 31 % à bouder les urnes.
On peut certes y voir une nouvelle manifestation du divorce entre la classe politique et les citoyens. De plus, les compétences des Conseils régionaux sont méconnues des Français quand ceux-ci n'ignorent pas ... le mode de scrutin lui-même !
Il faut toutefois relativiser l’importance de ce taux d’abstention. En 1986, les régionales étaient couplées avec les législatives, d’où la forte participation. En 1992, il s’agissait pour beaucoup d’électeurs de manifester leur mécontentement envers le pouvoir après trois années sans élection.
Mais on a atteint des taux d’abstention plus élevés à des élections locales dans les années 60 et 70. Et en 1988, moins d’un électeur sur deux s’était déplacé pour les cantonales.
Une des raisons de cet absentéisme électoral peut être que le climat politique est plus décrispé qu’avant l’arrivée de Lionel Jospin à Matignon. Les élections intermédiaires sont souvent l’occasion pour les Français de manifester nettement leur mécontentement envers le pouvoir en place. Cela n’a pas vraiment été le cas cette fois-ci, ce qui constitue déjà un succès pour le gouvernement.
En nombre d’élus, alors qu’elle ne dirigeait
que deux régions métropolitaines (Limousin et Nord-Pas-de-Calais),
la "gauche plurielle" devance la droite modérée dans douze
régions (Aquitaine, Bourgogne, Centre, Franche-Comté, Ile-de-France,
Languedoc-Roussillon, Limousin, Midi-Pyrénées, Nord-Pas-de-Calais,
Haute-Normandie, Picardie, Provence-Alpes-Côte-d’Azur).
Ce rééquilibrage est une indéniable victoire. En voix, certaines tendances observées lors des législatives anticipées de l’an dernier sont confirmées : le Front national est ancré aux alentours de 15 % des voix, la droite classique est soutenue par à peine près 36 % des votants.
Mais, par rapport aux législatives de l’an dernier, il y a un net recul de la majorité : son score est rogné par les petites listes "divers" et par une extrême gauche qui approche le seuil des 5 % -qu’Arlette Laguiller avait dépassés lors de la présidentielle de 1995. Même si l’on compare ces régionales aux précédentes, il n’y a pas d’avancée de la gauche plurielle.
Celle-ci a donc raison de ne pas pavoiser. Sa progression
en nombre de sièges s’explique surtout par sa stratégie des
listes d’union, payante dans le système de proportionnelle départementale
et par l’érosion du vote écologiste par rapport à
1992. Encore faut-il garder en tête que la gauche plurielle ne dispose
de la majorité absolue que dans une région (le Limousin),
deux si on lui adjoint les élus de Lutte ouvrière (avec le
Nord-Pas-de-Calais). Dans les autres régions, les droites au sens
large arrivent en tête en comptant le Front national.
Préoccupation morale et intérêt tactique se mêlent donc pour conduire la gauche à se montrer vigilante sur d’éventuelles élections de présidents UDF ou RPR de conseils régionaux grâce à l’appoint du Front national. En 1986, la droite modérée et le parti de Jean-Marie Le Pen s’étaient alliés dans un certain nombre de régions. En 1992, ces accords avaient été dénoncés. Officiellement, la ligne est la même aujourd’hui, mais au niveau local, les tentations sont fortes...
LA
MEDIOCRE PERFORMANCE DES SONDAGES
(24 mars 1998)
En mai 1997, après le premier tour des législatives, les sondages avaient, selon la coutume, été mis en accusation car ils avaient pendant presque toute la campagne donné un léger avantage à la droite alors que la gauche gagna finalement les élections. Ces critiques étaient très largement injustes : à quelques dixièmes de points près, les résultats du vote étaient conformes aux dernières enquêtes publiées (et plus encore aux dernières enquêtes confidentielles). Et les instituts avaient souligné le caractère ouvert de la compétition, ces quelques dixièmes de points étant justement à même de faire basculer la victoire dans un camp ou dans l'autre.
C'est un peu le contraire qui s'est produit cette fois-ci : le nombre de région dans lesquelles la gauche dispose d'une majorité relative avait été plutôt bien apprécié par les dernières enquêtes publiées, mais les écarts en voix entre sondages et résultat sont supérieurs à la normale. Les extrêmes sont désormais assez bien cernés alors qu'ils étaient traditionnellement difficiles à mesurer (surestimation du PC en 1981, sous-estimation du FN pendant toutes les années 80) : les sondages sont tombés justes pour le Front national et la poussée de l'extrême gauche avait été annoncée. Idem pour le score de la droite modérée dans son ensemble (bien que les listes divers droite aient finalement concurrencé légèrement plus que prévu les listes UDF/RPR).
En revanche, la gauche plurielle a été nettement surestimée : créditée d'environ 40 % des suffrages dans les derniers sondages publiés (plus encore dans les confidentiels de la dernière semaine), elle ne devait finalement en recueillir que 34,4 % selon le Ministère de l'intérieur. Certes, les étiquettes attribuées aux petits candidats sont parfois sujettes à caution : Le Monde, qui publie pour chaque élection sa propre totalisation, arrive ainsi à 36,6 % pour la gauche (hors extrême gauche). Mais l'écart persiste : les listes de la majorité gouvernementale ont pâti plus que prévu de la présence des divers écologistes et des autres listes difficilement classables.
Pierre Giacometti, directeur général d'Ipsos Opinion, expliquait ainsi le phénomène dans Libération du 17 mars : "Il y a eu peut-être une prime à 'l'air du temps', c'est-à-dire à la gauche plurielle. Les personnes interrogées étaient censées choisir une liste, et, probablement par réflexe normatif, sans trop y réfléchir, certaines ont pu se réfugier vers un vote central en se prononçant pour une liste d'union de la gauche, mais sans grande conviction".
Au cours de la dernière semaine, plusieurs enquêtes avaient pu laisser croire à une assez forte dynamique de gauche et au basculement d'un nombre plus important de régions. Il n'en a rien été.
Quant aux estimations de 20 heures, elles ont été très fiables pour Ipsos et la SOFRES. On peut seulement regretter que France 2 et son partenaire Ipsos aient tout au long de la soirée électorale omis de mentionner les scores des divers gauche et des divers tout court. CSA a été beaucoup moins brillant : tant sur le plan national qu'au niveau régional, les estimations ont somme toutes été assez médiocres pour cet institut.
SONDAGES
Moyenne des dernières enquêtes publiées (SOFRES, Ipsos, CSA) |
RESULTAT
Totalisation nationale (Ministère de l'Intérieur) |
|
Extrême gauche | 3,8 | 4,5 |
---|---|---|
Gauche plurielle | 40,0 | 34,4 |
Divers écologistes | 2,8 | 5,2 |
Divers |
|
|
Droite modérée | 35,5 | 35,9 |
FN | 14,9 | 15,0 |
POUR EN SAVOIR PLUS sur les limites des sondages réalisés avant le scrutin régional, on peut se reporter à Canal Ipsos qui propose un débat sur le sujet entre Eric Dupin et Pierre Giacometti.
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