AUTORITÉ
Sur une base régulière, mon employeur convoque ses employés dans son bureau afin de les évaluer et d'évaluer leurs rendements. Je reviens à peine d'une de ces évaluations et c'est probablement ma dernière. Évaluation ou plutôt exercice de contrôle qui consiste à se faire dire par une personne hiérarchiquement supérieure quel sont nos points forts et nos points faibles. Une personne qui ne connaît pratiquement rien de moi Vient me dire qu'est-ce que je devrais faire et ne pas faire, afin qu'elle soit amplement satisfait de mon travail. En plus, cette personne est convaincue que cette évaluation me sera bénéfique. Allons donc, pour estimer ma compétence je n'ai pas besoin de mon supérieur immédiat qui d'une signature peut décider de mon congédiement. Je n'appelle pas ça une évaluation, mais plutôt une méthode d'asservissement totalitaire. Prend garde à ce que tu peux dire, il a déjà la main sur son crayon.
Vous rendez vous compte que mon supérieur m'a traité d'anarchiste et de leader négatif. Moi, anarchiste, parce que d'après lui je suis un contestataire et que je ne cesse de revendiquer. Bien sûr, que je suis contestataire et bien sûr que je revendique. Je crois qu'il est de mon devoir d'être humain de contester cette autorité bourgeoise imposée et injustifiée. Il est évident que je revendique mon droit à une meilleure ambiance de travail, à un meilleur environnement, à une simplification de ces règles bureaucratiques compliquées, car nous devons prendre possession de notre lieu de travail. Leader négatif, allons donc, à ses yeux sûrement, aux yeux de mes camarades de travails, sûrement pas. L'employeur reconnaît mon leadership, mais d'après lui je fais fausse route. Je devrais plutôt orienter mes efforts dans une autre voie, c'est à dire la sienne. Ça non merci, je ne suis pas un traître. C'est en respectant mon éthique personnel que j'obtiens le respect de mes camarades et ce qui est plus important à mes yeux, le respect de ma personne, de mon intégrité. Non, je n'ai pas honte, non je n'ai pas la tête basse. Oui, je défie vos lois, vos manières de fonctionner, car au fond de moi, la voix de la dignité humaine me crie que je n'ai pas tord, que ma cause est juste, celle de l'amélioration de mes conditions de vie et de travail. Cesser de contester et de revendiquer, jamais, car ce serait vous donner raisons et ça jamais. Cesser de lutter, c'est mourir et je ne veux pas mourir.
Il osa me demander si je lui en voulais personnellement. Bien sur que non, mais nous sommes dans des camps opposés et de toute façon ce n'est pas moi qui est commencé cette guerre, la lutte de classe existait bien avant ma naissance. C'est juste que moi je suis conscient de mon camp, de ma position de classe et que tout comme lui je défends mes intérêts, intérêts qui sont différents des siens. Lui en vouloir personnellement, non, mais on ne peut faire la guerre sans haïr ses ennemis. Cette personne se relève en m'écrasant et je devrais être satisfait et lui dire merci. C'est mal me connaître. Mieux vaut mourir debout que de vivre à jamais à genoux.
Et si je ne me lève pas, et si je ne conteste pas, et si je ne revendique pas, qui le fera à ma place? je ne peux répondre à cette question. Anarchiste, non je ne le suis pas, je ne recherche pas le chaos et la destruction, je ne vise pas le refus de l'autorité à tout prix. Je suis contre cette autorité bourgeoise insensée, injustifiée et invalide. Jamais je n'ai voté pour me faire diriger par cette personne, jamais je n'ai eu mon mot à dire. C'est contre cette absence de démocratie et cette illusion de pouvoir acceptable que j'en veux et c'est pour ça que je me bats. Pour pouvoir être maître de mon environnement sans avoir à écraser un camarade pour être estimer de moi même et de quelques autres.