Romandie
1. La Suisse existe-t-elle?
Oui, la Suisse existe et je
suis fier d'en être originaire. Notre multilinguisme, notre
démocratie, notre fédéralisme, notre position
centrale en Europe justifient, à mes yeux, cette existence.
2. La Suisse est-elle une nation ?
La Suisse est une nation, malgré ses différences
culturelles et linguistiques. Je suis convaincu que la majorité
de notre population se sent suisse. Bien que nous n'ayons pas
participé à la Deuxième Guerre mondiale,
nous avons été obligés de défendre
nos frontières, ce qui a renforcé notre cohésion.
Nous avons découvert dans cette cohésion le sentiment
de former une nation.
3. Quels sont les dangers
qui la menacent?
Ces dernières années, l'expérience m'a montré
qu'il existait des sensibilités différentes selon
les régions du pays. On parle toujours de fossé
culturel ou linguistique, mais jamais de fossé économique.
Or, c'est celui-là qui est de loin le plus important. Voyez
la loi sur le travail ou la loi sur le chômage. Il n'est
pas indifférent de savoir que les demandes de référendum
sont, à chaque fois, parties de Suisse romande. Romands
et Tessinois vivent la crise différemment, parce que le
taux de chômage est plus élevé chez eux. Il
faut donc être plus attentif aux besoins de chaque région,
se garder par exemple de fermer des filiales romandes pour préserver
les emplois en Suisse alémanique.
4. Quelles sont les
mesures qui pourraient garantir qu'elle n'éclatera pas?
Ou qu'elle ne s'isolera pas définitivement? SSR et idée
suisse, subventions à la culture, etc
Tout commence, pour moi, avec la maîtrise des langues. Parler
la langue de l'autre est un gage de cohésion. Cela permet
aussi aux Romands de venir parler à la télévision
alémanique, et inversement. Développer ce genre
d'échanges est extrêmement souhaitable.
5. A quoi peut servir la
Suisse en Europe?
L'Union européenne
est en train de se donner de nouvelles structures en vue de son
élargissement vers l'Est. Elle peut trouver, pour y parvenir,
des modèles d'organisation dans un pays ou dans un autre:
bicaméralisme, subsidiarité, etc. Je ne crois pas
que notre démocratie directe soit exportable. Je pense
au contraire que nous autres Suisses devrions réfléchir
aux moyens de la faire mieux fonctionner, de l'ajuster aux impératifs
européens.
6. L'Europe de 2020
sera -t-elle une Europe des nations ou une Europe fédérale?
La richesse de l'Europe, ce
sont ses nations. Pourquoi détruire cette richesse?
7. Avez-vous peur de l'Allemagne?
Non. Après la Deuxième
Guerre mondiale, l'Allemagne a connu un changement profond. La
démocratie y fonctionne très bien.
8. Confrontée
à un afflux de réfugiés en provenance de
régions en crise, comment la Suisse doit-elle réagir?
Doit-elle être plus généreuse, peut-elle être
plus généreuse, comment concilier le coeur et la
raison?
En cas de crise, nous devrions
avoir la possibilité d'être généreux,
d'accueillir globalement les réfugiés en fuite et,
une fois la crise passée, de faciliter leur retour. Mais
pour y arriver, nous devrions nous montrer plus stricts dans les
procédures ordinaires.
Pierre-Alexandre Joye, Pierre-André
Stauffer et Michel Zendali