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Tubes photomultiplicateurs à Réponse Rapide

Tubes photomultiplicateurs à Réponse Rapide

Source : " R.T.C La RadioTechnique Compelec 1968 "

Le développement de la recherche, en physique nucléaire, a suivi, ces dernières années, un rythme accéléré nécessitant, de ce fait, la mise au point de techniques de mesure de plus en plus précises et complexes. Naturellement, il était nécessaire d'améliorer parallèlement l'instrumentation de mesure afin de permettre aux chercheurs de s'engager dans de nouvelles voies, jusqu'ici, inaccessibles ou, tout simplement, pour éloigner le plus possible les limites imposées à la précision des mesures par l'appareillage utilisé antérieurement.

Les tubes photomultiplicateurs qui sont, aujourd'hui, parmi les instruments de détection les mieux adaptés à la recherche ou à l'expérimentation, en physique atomique, ont subi, depuis leur création, de continuelles améliorations, au fur et à mesure que s'approfondissaient les connaissances en physique fondamentale tout comme en technologie. Actuellement, les propriétés des tubes photomultiplicateurs se rapprochent des limites théoriques mais les progrès réalisés, s'ils peuvent tendre à se ralentir, se poursuivent néanmoins.

Dans ce sens, la très grande variété des types de photomultiplicateurs suffit à montrer à quel point a été poussé le souci de la spécialisation d'emploi, à laquelle chaque type de photomultiplicateur est maintenant soumis.

Ainsi, ont pu être produites différentes catégories nouvelles de détecteurs parmi lesquelles nous pouvons classer, entre autres composants de choix, les photomultiplicateurs à grande stabilité destinés à la spectrométrie particulaire ou électromagnétique, les photomultiplicateurs à très faible bruit conçus plus spécialement pour les mesures de microactivité, les photomultiplicateurs renforcés établis en vue des applications spatiales, ou les photomultiplicateurs à réponse rapide et à grand domaine de linéarité, qui permettent de mesurer, aujourd'hui, des phénomènes évoluant très rapidement dans le temps ou se répétant à des fréquences très élevées, en physique des hautes énergies.

Cette documentation consacrée, précisément, aux photomultiplicateurs de physique à réponse rapide, se propose de faire connaître les performances remarquables de temps et de linéarité qui ont pu être obtenues. Indiquons par exemple, que de tels photomultiplicateurs sollicités par une impulsion de lumière très brève, fournissent, en réponse, une impulsion de courant dont le temps de montée est de l'ordre de la nanoseconde : cette propriété fait ainsi du photomultiplicateur, le meilleur amplificateur à large bande que l'on connaisse.

I - Introduction

Depuis plusieurs années, les physiciens ont ressenti la nécessité de développer les qualités de réponse des tubes photomultiplicateurs, pour exploiter plus à fond la brièveté des impulsions de lumière fournies par les détecteurs à scintillations. En effet, dans certaines substances, la durée des impulsions lumineuses ne dépasse pas quelques nanosecondes et la lumière émise par effet Cerenkov, dans les milieux transparents, par les particules relativistes, a une durée moindre encore.

De nombreuses expériences, en physique nucléaire, devenaient alors possibles, en particulier, la détermination de la vie moyenne des états excités dans les noyaux, par des méthodes de " coïncidence rapide " ou celle de la vitesse des particules de haute énergie, par des mesures dites de " temps de vol ".

Pour tous ces motifs, nos laboratoires ont été amenés à étudier et à réaliser de nouveaux tubes photomultiplicateurs " à réponse rapide ", présentant plus spécialement les propriétés suivantes :

Il - Rappel des principales propriétés d'un tube photomultiplicateur

Avant d'aborder l'étude proprement dite des tubes photomultiplicateurs (t à réponse rapide " et d'analyser les problèmes que pose la réalisation de tels tubes, nous avons pensé qu'il serait opportun de rappeler brièvement les propriétés générales des tubes photomultiplicateurs qui ont déjà fait l'objet d'une brochure très détaillée (1).

II.1 - Constitution d'un tube photomultiplicateur

Rappelons en quelques mots comment est constitué un tube photomultiplicateur.

Il se compose :

Cet ensemble est enfermé dans une enveloppe étanche, à l'intérieur de laquelle est maintenu un vide aussi poussé que possible. Ce dernier point est une condition de bon fonctionnement tant des couches photoémissives que des couches à émission secondaire et surtout une condition de stabilité de leurs propriétés.

II.2 - Principales propriétés d'un tube photomultiplicateur

II.2.1 - La photocathode

En reprenant, dans l'ordre logique, les éléments constitutifs d'un photomultiplicateur, nous allons exposer à chaque étape leurs propriétés et les différents problèmes qu'il a fallu résoudre.

La qualité d'un photomultiplicateur dépend, en premier lieu, de sa photocathode. Ses principales caractéristiques sont: la sensibilité, la réponse spectrale, l homogénéité ainsi que le niveau de l'émission spontanée parasite produite en l'absence de toute radiation incidente.

Dans les applications photométriques, la sensibilité d'une photocathode s'exprime soit en ampères par lumen (cas d'une lumière blanche de composition spécifiée, soit en ampères par watt (cas d'une radiation monochromatique). Toutefois, on peut aussi exprimer la sensibilité sous la forme d'un " rendement quantique ", défini par le nombre d'électrons émis pour 100 photons incidents, de fréquence déterminée, reçus par la photocathode.

Définition de la sensibilité de photocathode

La sensibilité de photocathode est le rapport entre l'intensité du courant photoélectrique émis et la puissance lumineuse reçue. Elle s'exprime en A/W.

Définition du rendement quantique

Le rendement quantique est le rapport entre le nombre d'électrons émis et le nombre de photons incidents. Il s'exprime par un pourcentage, pour une longueur d'onde bien définie.

La sensibilité d'une photocathode est liée aux caractéristiques de la substance photoémissive considérée mais, également, à la longueur d'onde de la radiation lumineuse incidente. La courbe de variation de la sensibilité d'une photocathode en fonction de la longueur d'onde des photons incidents est alors appelée " courbe de réponse spectrale ".

Quelle que soit l'amplification, d'ailleurs considérable, fournie ultérieurement par le multiplicateur, il est important que la sensibilité cathodique soit la plus élevée possible. En effet, l'émission des photoélectrons par la cathode est un phénomène essentiellement aléatoire : un photon ne libère qu'en moyenne le même nombre d'électrons par unité de temps, avec des probabilités de fluctuations relatives d'autant plus petites que la sensibilité de la photocathode est plus grande. Une amplification ultérieure reproduira ces fluctuations d'émission électronique qui apparaîtront sur la hauteur de l'impulsion anodique. C'est pourquoi, on exige que la cathode ait un rendement quantique aussi élevé que possible.

La lumière ne prend pas toujours naissance, d'une scintillation à l'autre, en une même région du milieu détecteur; elle est inégalement diffusée et elle affecte, par conséquent, des zones différentes de la photocathode. Nous avons là, une nouvelle cause de variation de la hauteur d'impulsion qui en résulte, Si, par manque d'homogénéité, la sensibilité locale de la photocathode varie d'un point à l'autre. L'homogénéité de la cathode est donc une caractéristique importante que l'on cherche sans cesse à améliorer par l'application de nouvelles techniques de fabrication.

L'homogénéité d'une photocathode peut être étudiée d'une manière relativement simple en utilisant un appareillage spécial dans lequel un spot lumineux très fin balaye diamétralement toute la surface utile de la photocathode. Les variations du courant photoélectrique, en fonction des coordonnées du spot, sont alors reproduites sur l'écran d'un tube oscilloscope, puis photographiées.

Un autre élément important à considérer est le " courant d'obscurité ". On désigne par ce terme le signal électrique obtenu sur l'anode du photomultiplicateur, en l'absence de tout éclairement de la photocathode. Or, une part souvent importante de ce signal parasite est due à l'émission spontanée d'électrons par les différentes électrodes du tube. Il s'agit principalement d'un courant thermoélectronique, émis à la température ambiante par la photocathode ou par les dynodes, en raison de leur faible " travail de sortie ". Un refroidissement du tube réduit effectivement, mais de manière variable, ce courant d'obscurité.

11.2.2 L'optique d'entrée

L'optique d'entrée est l'ensemble des électrodes destinées à guider les électrons issus de la photocathode jusque sur la zone active de la première dynode du multiplicateur. Elle doit, dans ces conditions, répondre à deux exigences difficilement conciliables :

Une caractéristique importante de l'optique d'entrée est donc le pourcentage d'électrons qu'elle introduit effectivement dans le multiplicateur ou, autrement dit, son efficacité de collection. Il est souhaitable que celle-ci soit voisine de 100 %.

On distingue l'efficacité moyenne relative à l'émission de " toute " la cathode et l'efficacité locale qui n'intéresse qu'une région " limitée " de celle-ci.

Signalons que pendant longtemps, et pour des raisons de commodité de réglage, l'optique d'entrée était constituée seulement de deux électrodes : la photocathode et la première dynode du multiplicateur. Cependant, au cours des dernières années, on a pu constater qu'il est absolument nécessaire de rajouter une ou deux électrodes intermédiaires, afin d'augmenter le degré de précision, aussi bien pour la focalisation dans l'espace, dont dépend l'efficacité de collection, que pour ce que nous appellerons, par analogie, la " focalisation dans le temps ", c'est-à-dire la recherche de " l'isochronisme " le plus parfait possible : il s'agit en effet d'éviter, autant que possible, que les électrons puissent présenter des temps de parcours différents dans leurs trajets d'une électrode à l'autre. Ce problème prend donc une importance primordiale dès que l'on aborde l'étude des photomultiplicateurs à réponse rapide.

11.2.3 Le multiplicateur

Le multiplicateur, constitué par l'ensemble des dynodes, débute par " une zone de transition " qui est l'une des plus critiques de tout le photomultiplicateur. Cette zone se caractérise, en général, par la présence de deux ou trois dynodes à profil distinct de celui des autres dynodes appartenant à la portion itérative du multiplicateur. Ces premières dynodes, de géométrie particulière, ont pour rôle, outre la multiplication pure et simple, d'adapter le faisceau électronique incident, formé entre la photocathode et la première dynode, à l'incidence moyenne et à l'ouverture angulaire requises par la structure itérative.

L'amplification totale apportée par le multiplicateur dépend du nombre des dynodes et du " gain de chaque étage ". Nous désignons par ce terme, le rapport du nombre des électrons secondaires reçus sur une dynode de rang (i+ 1) et du nombre des électrons reçus sur la dynode de rang i.

Le gain d'un étage (i) apparaît ainsi comme étant le produit du coefficient d'émission secondaire di de la dynode (i) par l'efficacité de collection ni de cet étage, soit: gi = di.ni

Or, compte tenu du caractère statistique du phénomène d'émission secondaire et du nombre relativement faible des électrons à l'entrée du multiplicateur, il est nécessaire d'obtenir, à chaque étage, une efficacité de collection aussi voisine des 100 % que possible et de prévoir des conditions de fonctionnement qui rendent le gain par étage maximal.

En outre, à chaque étage de multiplication, on retrouve un problème analogue à celui rencontré dans l'optique d'entrée la recherche d'un meilleur isochronisme des trajectoires électroniques. Il s'agit, en effet, que, quels que soient leur vitesse initiale et le point d'où ils sont partis, les électrons puissent se déplacer en un même temps d'une dynode à la suivante : c'est là encore, un problème d'optique électronique où interviennent le profil des dynodes et les potentiels qui leur sont appliqués.

Mentionnons aussi les phénomènes parasites qui se produisent dans le tube et peuvent être une cause d'instabilité de fonctionnement. Ces phénomènes prennent d'ailleurs d'autant plus d'importance que la haute tension appliquée sur le tube est plus élevée.

Parmi ces phénomènes, outre l'émission thermoélectronique de la cathode et des dynodes, on peut citer:

En résumé, le nombre des dynodes, leur géométrie, et les potentiels qui leur sont appliqués sont autant de paramètres dont on doit tenir compte pour concilier à la fois les conditions de gain élevé, de courant d'obscurité faible, de stabilité et d'isochronisme des trajectoires électroniques.

    1. - Limites introduites par les photomultiplicateurs dans la précision des mesures

En physique nucléaire, le tube photomultiplicateur est essentiellement utilisé, en association avec un scintillateur, soit pour déterminer l'énergie inconnue d'un rayonnement, soit pour localiser de manière la plus précise possible l'instant d'apparition d'une particule, soit pour mesurer l'intervalle de temps séparant, par exemple, deux événements nucléaires.

A la sortie d'un détecteur à scintillations, la quantité d'électricité recueillie est proportionnelle, en première approximation, à l'énergie perdue dans le scintillateur par le rayonnement incident. Les mesures d'énergie se ramènent donc à des mesures de quantité d'électricité. Cependant, les phénomènes physiques qui interviennent dans ce type de détecteur, entre le moment où la particule pénètre dans le scintillateur et l'instant où la charge électrique arrive sur l'anode, sont de nature aléatoire, de sorte qu'il existe une limitation naturelle à la précision de la mesure d'énergie. Cette limitation est due aux fluctuations statistiques qui affectent le nombre de charges élémentaires recueillies à l'anode.

De la même façon, les fluctuations statistiques apportent une limitation à la précision des mesures de temps. Celles-ci sont, en effet, basées sur l'instant d'apparition d'un élément caractéristique de l'impulsion anodique : amplitude maximale, point à50 0À du temps de montée, centre de gravité de l'impulsion, etc. Or, précisément, le temps qui s'écoule entre le moment où la particule pénètre dans le scintillateur et l'instant où apparaît l'élément caractéristique de l'impulsion correspondante est aléatoire et présente une certaine dispersion statistique autour du temps de réponse moyen du tube. Cette dispersion limite la précision en temps qu'il est possible d'obtenir.

Une étude complète des photomultiplicateurs doit donc comporter l'étude des fluctuations statistiques qui interviennent à différents stades des transformations subies par le signal lumineux incident, au cours de sa conversion et de son amplification. Cela va faire l'objet des chapitres suivants.

A suivre...

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