L'histoire de Ramzi Abid ressemble à celle de milliers de jeunes Québécois. Elle repose sur un rêve, un objectif ultime à atteindre. Né à Montréal d'un père tunisien et d'une mère écossaise, il a franchi les étapes habituelles, celles que connaissent tous les joueurs de hockey capables d'entretenir leur rêve.
«Quand j'avais trois ans, ma mère ma amené à une activité de patinage, raconte Ramzi Abid. Mes parents ont vu que j'avais un certain talent et j'ai commencé à jouer au hockey à l'âge de cinq ans. Tout est parti de là. J'ai suivi les échelons et je me suis finalement retrouvé au midget AAA avec le collège Charles-Lemoyne de Richelieu.
«Les Saguenéens m'ont repêché en cinquième ronde (en 1996) alors que j'avais 15 ans. Pour être bien franc, j'ai été déçu de sortir seulement au cinquième tour. Je croyais être choisi beaucoup plus rapidement. Je l'ai pris comme un défi. Quand je me suis présenté aux Saguenéens, j'avais dans la tête de prouver que j'étais meilleur que tous les joueurs sélectionnés avant moi.»
Deux saisons à Chicoutimi ont permis à Ramzi Abid d'effectuer un bond gigantesque vers l'objectif qu'il poursuit depuis des années. Il a laissé derrière lui bien des adversaires à qui on promettait un bel avenir.
En juin prochain, à la séance annuelle de sélection de la Ligue nationale de hockey, le nom de Ramzi Abid devrait être prononcé très rapidement.
Le travail de l'attaquant de 17 ans pendant la saison régulière qui vient de prendre fin a incité une foule de recruteurs professionnels à découvrir Chicoutimi. Match après match, des représentants de la Ligue nationale ont scruté à la loupe sa poussée vers le championnat des pointeurs de la Ligue junior majeur du Québec. En 25 ans d'histoire, les Saguenéens ont rarement vu un attaquant attirer autant les regards. Plusieurs gardiens. Pas un attaquant.
Devant cette procession de recruteurs professionnels à Chicoutimi, Ramzi Abid n'a jamais perdu la tête. Son objectif est le même. Il n'a pas changé depuis le jour où le hockey est devenu une partie de son quotidien.
«Je rêve de jouer dans la Ligue nationale depuis que je suis tout jeune, indique celui qui a dominé les pointeurs de la LHJMQ cette saison grâce à une récolte de 50 buts et 83 passes. Je ne suis pas là-dedans pour l'argent. J'aimerais gagner ma vie en faisant ce que j'aime le plus au monde. J'espère atteindre mon but le plus rapidement possible.
«Je ne saute pas les étapes. En ce moment, je veux connaître de bonnes séries éliminatoires. Je penserai par après au repêchage de la Ligue nationale. Ensuite, ce sera mon premier camp professionnel. J'aime jouer au hockey. Ce sport prend beaucoup de place dans ma vie.
«A Chicoutimi, je partage mon temps entre le hockey et les études. J'étudie en sciences humaines au cégep. Les études sont très importantes pour moi. On ne sait jamais ce qui peut se produire. Une blessure arrive vite. Il est possible de conjuguer le hockey et les études. L'an dernier, j'ai réussi mes quatre cours même si nous avons passé beaucoup de temps sur la route durant les séries. Quand tu veux jouer au hockey, tu dois être prêt à faire les sacrifices. Tu étudies quand tu le peux et où tu le peux. Ça demande une bonne discipline personnelle.»
Abid termine déjà sa deuxième saison dans la LHJMQ. Sa première campagne avec les Saguenéens a pris fin avec une production de 13 buts et 24 passes. Elle a principalement été marquée d'une participation au tournoi de la coupe Memorial à Hull.
Entre une saison de 37 points et une autre de 138, il y a évidemment toute une différence. Son succès des derniers mois, il l'explique en bonne partie par l'expérience obtenue à sa première année.
«Le gros déclic s'est fait l'an passé, note Ramzi Abid. Pendant ma première année, je me suis aperçu que j'avais vraiment une chance de gagner ma vie grâce au hockey. Il s'agit d'y mettre les efforts.
«Je dois beaucoup à Réal Paiement. A ma première saison avec les Saguenéens, il m'a utilisé régulièrement. Il m'a fait jouer en saison régulière, en séries et durant la coupe Memorial. J'ai pris beaucoup d'expérience et de confiance. Lorsque je me suis présenté au camp, j'avais confiance en mes moyens. Au fur et à mesure que la saison a progressé, je me suis aperçu que je pouvais faire beaucoup de choses sur une patinoire.»
Effectivement, Abid peut faire beaucoup de choses sur une patinoire. Il a accompagné sa production offensive de 266 minutes de pénalités. Il est devenu, cette saison, le champion pointeur le plus pénalisé de toute l'histoire de la Ligue junior majeur du Québec.
«Je crois avoir également un rôle de leader à jouer au sein de l'équipe, poursuit-il. Même si je n'ai que 17 ans, j'ai un rôle à jouer autant sur la glace que dans le vestiaire. L'âge n'a pas vraiment d'importance.»
Parlez-en à ses adversaires.
LE PROGRES-DIMANCHE, le 22 Mars 1998