"Science et violence sont deux modalités potentiellement perverses des cultures et de la nature humaines. Je me défie en réalité dé l'une comme de l'autre. On nous reprochait la méchanceté agressive de certains textes -il n'exprimaient rien d'autre que la rage que suscite la mort des illusions. 1979 était une année infiniment triste et désenchantée. On aura compris , je suppose, que cet album est profondément, et désespérément sentimental."
CARRE-LADICH-MARCHAL |
O. CARRE. Prométhane (1979) |
ENTREVUE AVEC JACK MARCHAL
Jack M. : Disons que je suis un militant nationaliste qui aime (beaucoup) faire de la musique et qui dessine (un peu) parfois Nationaliste à 100%, c'est sûr, et depuis 30 ans, mais peut-être pas toujours aussi militant que je devrais. Q : A été récemment réédité L'album "Science & Violence", que tu avais enregistré en 1979 à Rome avec Olivier Carré et l'Italien Mario Ladich. D'où est venue l'idée de cet album ? Jack M. : J'ai connu Olivier au GUD vers 1973. Nous avions l'un comme l'autre été dans des groupes de rock durant nos années de lycée, Olivier comme batteur, moi comme guitariste. Nous avons donc formé un groupe, le premier du genre dans la mouvance nationaliste. Le problème était de trouver d'autres musiciens, ce qui n'était pas facile, car ils étaient réticents à l'idée de créer des chansons originales, ils préféraient s'en tenir à des reprises des Rolling Stones. Nous nous sommes donc surtout limités à composer des trucs pour nous seuls, à enregistrer des maquettes bricolées à la maison, au cas où Nous avions la sensation d'être complètement isolés dans notre trip. Le déclic est venu de la parution à peu près simultanée, en 1978, des premiers albums de Ragnaröck, en Allemagne, et de Janus, en Italie. Ces deux groupes faisaient une musique pas toujours géniale, il faut dire, mais avec des textes militants comme personne n'en avait encore fait. Nous nous sommes dits : pourquoi pas nous ? Le chef de Janus, Mario Ladich, qui possédait une salle de répétition à Rome, s'est offert pour nous aider. Comme il était batteur, Olivier lui a laissé les baguettes. Et comme il était impossible de faire venir d'autres musiciens à Rome pour dix jours de répétition en plein mois d'août, j'ai jugé plus simple de jouer moi-même les autres instruments. Et voilà comment a été fabriqué "Science & Violence", début septembre 1979 à Rome. Q : Quelles ont été les influences musicales et intellectuelles de ce album? Jack M. : Elles me paraissent assez évidentes. La fin des années 70 était dominées par deux genres bien différents, d'un côté le punk, de l'autre côté un style plutôt sophistiqué basé sur des morceaux longs et enchaînés les uns aux autres, et dont Pink Floyd était le chef de file. Les Who étaient un peu la charnière entre les deux. Tel est l'environnement musical dans lequel s'est inscrit cet album. On n'échappe pas à son époque. Je pense qu'on peut résumer le concept de l'album de la façon suivante : on énonce des projets grandioses de révolution car plus rien n'est à sauver dans le monde actuel (On Efface Tout), on se rend compte que ce ne sera pas facile, que ça risque d'être cruel (Derrière Ta Porte), que la vérité est en fait dans le retour sur soi-même, sur sa propre mémoire, celle de son peuple, le retour sur l'enracinement (Parcours), que c'est là que se trouvent les vérités, les certitudes Bien sûr, expliquées comme ça, ces idées ne feraient pas de très bons textes. C'est pourquoi les paroles peuvent paraître un peu hermétiques. Q : Beaucoup de gens ne savent comment comprendre la chanson "Derrière Ta Porte". Comment l'interprétez-vous ? Qui se cache(nt) derrière ce "monsieur" ? Jack M. : C'est juste un rêve mégalomane, celui d'une volonté de puissance poussée à l'extrême limite, en pilotant un colossal engin blindé qui viendrait anéantir la pourriture ambiante, sans le moindre scrupule, et remettre au pas une société qui a poussé de travers. Le "monsieur" dont il est question est juste le n'importe quel brave idiot qui n'est pas dans le coup, qui attend bêtement sa femme chez lui, et qui ne peut comprendre que notre rêve va être son cauchemar. Qui a tort, qui a raison ? C'est sans doute l'idiot qui a tort, mais on peut tirer la conclusion qu'on veut. Q : Les textes de " Parcours " sont très riches et pleins d'une sorte de spleen romantique. Cela est-il le reflet de cette "année infiniment triste et désenchantée" qu'était 1979 ? Jack M. : D'une certaine façon, oui. Dans les années qui ont suivi mai 68, on pouvait croire que la révolution était à l'ordre du jour, que tout était possible. Et puis, au bout de 10 ans, est venue une sorte de gueule de bois : on s'est rendu compte alors que la crise était installée durablement, que l'immigration prenait une ampleur dramatique, que la mondialisation était en route, que les outrances sionistes donnaient le ton dans les médias, que plus rien n'était possible, que les belles années 60 étaient déjà loin. Toute une génération de militants a été saisie par le découragement. Ils se sont mariés, préoccupés uniquement de leur carrière, ou simplement de leur survie. Tout ces facteurs ont créé une atmosphère désenchantée et effectivement très triste. Là-dessus, s'est greffé autre chose. Les textes de "Parcours" exprimaient l'idée somme toute assez banale du voyage cyclique initiatique. Mais nous étions à Rome depuis des jours, dans cette ville impossible, mélange déroutant de grandeur et de vulgarité l'une comme l'autre insurpassables (en vérité je n'aime pas cette ville). Et là, l'idée du retour vers ses racines a pris une signification concrète, une dimension émotionnelle imprévue. Le mal du pays, presque. Les images de Paris que nous avions mises bout à bout (l'approche par l'autoroute du Sud, une fille qui rentre toute seule en taxi à la fin d'une fête, l'idée d'éternité que donne la ville déserte au cur de la nuit) se sont soudain trouvées gorgées de nostalgie. Si ces précisions peuvent aider à y voir un peu plus clair dans ces textes, elles n'auront peut-être pas été inutiles! Q : "Les Nazis font des Bêtises" et "Petite Musique de Grand Soir" sont à tous les niveaux différents du reste de l'album. Le ton est plus gai, humoristique, la musique plus électronique... Pourquoi ce changement? Jack M. : Question d'époque. Ces deux morceaux, inédits jusque là, ont été enregistrés plus d'un an après les autres. Entre-temps avaient commencé à apparaître les premiers synthétiseurs japonais bon marché (avant, ces engins coûtaient des fortunes) et j'ai pu m'acheter de ces joujoux. Donc, changement radical de style. D'autre part, la pression idéologique de nos ennemis a pris une ampleur tellement délirante et caricaturale qu'il valait mieux en rigoler. On entrait dans les années 80. Changement d'ambiance. Du reste, ce ton plus ironique me convenait mieux. Q : Olivier Carré est décédé le 31 août 1994, artiste talentueux, chanteur... Peux-tu nous parler de lui ? Jack M. : Non, si ce n'est pour redire ce que savent ceux qui l'ont connu : artiste complet, peintre incroyablement doué, esprit curieux de tout, d'une originalité phénoménale. Et aussi un génie de l'écriture. Tout ce que je puis ajouter est que nous avons eu une nuit un accident de moto, que l'un des deux est mort et que l'autre s'en est tiré indemne, et que les milliards de questions que nous ne ne sommes pas posées n'auront jamais de réponse. Voilà. Q: Que penses-tu des nouveaux groupes identitaires qui se manifestent depuis quelque temps ? Jack M. : Le plus grand bien possible. J'ai été enthousiasmé par l'émergence de Vae Victis, en 1995. D'autres groupes sont apparus dans leur sillage, Ile-de-France, Aion, In Memoriam, Elendil, il y a si longtemps que j'attendais ça ! J'ai personnellement un faible pour Elendil, dont l'humour décalé m'enchante. D'ailleurs, je joue plus ou moins avec eux. Q : La gauche caviar fête le 30e anniversaire de mai 1968. Ton avis sur cette "révolte" ? Jack M. : Le souvenir d'un grand merdier très divertissant vu en gros, et assez répugnant examiné dans le détail. J'ai trop vu de près en fac de Lettres à Nanterre les leaders de mai 68 pour avoir jamais eu la moindre illusion sur leur compte. Les médias nous présentent cette période comme une explosion de liberté, alors qu'en réalité cette période a ouvert une phase de terrorisme idéologique dans les lycées et les facs. Et c'est la même bêtise arrogante à front de zébu, les mêmes abrutis ivres de bonne conscience sectaire que nous voyons s'agiter autour de Fodé Sylla, au SCALP, à Ras-l'Front. Q : Peu des "révoltés" soixante-huitards sont restés fidèles à leur idéologie d'alors. Tu es nationaliste depuis longtemps. Quelles ont été les raisons de cet engagement ? Jack M. : Très bizarres : elles procèdent d'un prise de conscience purement intellectuelle, et tardive. Avant, j'étais vaguement de gauche, convenablement antiraciste, individualiste contestataire, limite baba cool (mes lectures favorites étaient toutefois Nietzsche et Céline, ce qui annonçait peut-être la suite ). Je méprisais les militants politiques en général, je détestais ceux d'extrême-droite, je les soupçonnais de vouloir m'empêcher de jouir de ce qui m'intéressait, la liberté, le rock, les filles, les fêtes. C'est seulement en arrivant en fac que j'ai commencé à réfléchir à quelques petits problèmes troublants. Celui-ci, par exemple. Il y a sans doute de grands philosophes, cinéastes ou écrivains potentiels chez les Papous mais on ne le saura jamais car la culture papoue ne vaut rien. Donc, la capacité de se réaliser soi-même dépend de la civilisation dans laquelle on est immergé. On n'existe qu'en tant que partie d'un tout, et d'un enracinement. Or, la puissance d'une culture est fonction de son degré de nationalisme. L'étude de la psychologie sociale et l'intérêt pour l'histoire m'ont démontré qu'un peuple dépourvu de sens identitaire n'a sur le long terme aucune chance dans la sélection naturelle qui se joue entre nations. S'il a existé de tels peuples, ils ont disparu. Au fond, il suffit qu'une nation s'affirme "élue" pour qu'elle le devienne réellement. Le rôle historique fondamental qu'ont joué les Romains, les Anglais, les Américains, les Juifs, les Japonais n'est au fond que l'effet de prétentions que leur démesure même a rendues productives. Il n'y a pas à sortir de là. Les gens qui ne cessent de dire que la France doit faire repentance du matin au soir et qu'au demeurant elle n'existe pas puisqu'elle n'est qu'un mélange d'Arabes, de Négro-Africains et de Chinois, ces gens-là savent très bien ce qu'ils font : ils veulent notre mort. Une fois que j'ai pris conscience de tout cela, je me suis senti un devoir absolu de devenir nationaliste. Et la rencontre avec les gauchistes du campus de Nanterre a fait le reste : les ennemis de ces bâtards ne pouvaient être que mes amis. Voilà comment j'ai rejoint la croix celtique, dans l'hiver 1966-67. A ce propos, je voudrais rectifier ton affirmation : les soixante-huitards sont pour l'essentiel restés fidèles à leur projet d'alors. S'ils ont troqué leur marxisme ringard pour le plus écurant libéralisme marchand, ils ont gardé la même mentalité totalitaire. Ce sont eux qui sont au pouvoir aujourd'hui, et on en voit les effets : censure généralisée, suppression progressive de toute liberté d'expression. On en est arrivé au point où il n'est plus possible de contester une loi sous prétexte qu'elle est censée exprimer ces fameuses "valeurs républicaines" dont on ne nous dit jamais ce qu'elles sont. Le terme de cette logique, c'est la mise hors-la-loi de toute opposition. On en prend le chemin. Q : Tu es resté nationaliste. Où trouves-tu la motivation ? Jack M. : Il suffit de regarder autour de soi et de faire fonctionner sa cervelle. |
O. CARRE Pariise (1979)
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