Front National / MNR face aux municipales 2001
TOULON, 7 fév (AFP) - L'atomisation de l'extrême droite dans son ancien laboratoire municipal et le report des voix de ses électeurs au second tour rendent des plus indécises l'issue des municipales à Toulon où la reconduction du mandat de l'ex-FN Jean-Marie Le Chevallier, paraît mal engagée.
Le sondage le plus récent (réalisé en octobre) place en tête du premier tour le sénateur et président du conseil général du Var Hubert Falco (DL), avec 33% devant la députée PS Odette Casanova (29%).
Mais le député européen et ancien préfet Jean-Charles Marchiani (RPF), crédité de 19%, pourrait bien jouer les trouble-fête en attirant les suffrages d'extrême droite dans une triangulaire si M. Le Chevallier n'était pas au second tour. Une quadrangulaire avec le maire sortant, qui obtiendrait 16% des voix le 11 mars selon le même sondage, est cependant très envisageable.
Sept listes se disputeront les faveurs des Toulonnais, qui, en 1995, avaient offert au FN sa seule ville de plus de 100.000 habitants. Aujourd'hui, M. Le Chevallier semble bien isolé en dépit du soutien du MNR et de Bruno Mégret.
Après le divorce fracassant de M. Le Chevallier avec Jean-Marie Le Pen en 1999, l'ancienne majorité présente trois listes. Celle du maire sortant, celle de l'avocat FN Jean-Louis Bouguereau et celle de Dominique Michel, adjoint délégué à l'urbanisme, ex-FN et ex-MNR.
Un isolement accentué par les ennuis judiciaires du maire. Porté à la mairie sous la bannière "tête haute et mains propres", M. Le Chevallier vient d'être condamné à un an de prison avec sursis et un an d'inéligibilité pour détournements de fonds publics et complicité d'abus de confiance.
Extrême droite "plurielle"
S'il a fait appel et s'il a par ailleurs été relaxé de poursuites engagées contre lui par le FN, il est à nouveau convoqué devant le juge en février pour subornation de témoins et fait encore l'objet de deux autres mises en examen.
Face à cette extrême droite "plurielle", M. Falco, candidat RPR-DL-UDF, fait valoir son expérience à la tête du département pour se présenter en bon gestionnaire, récusant, dans un souci de tourner la page, la plupart des conseillers municipaux sortants de la droite classique.
Mme Casanova, désignée aux dépens du député PS Robert Gaïa mis en examen au côté de M. Le Chevallier dans le dossier des cantines scolaires, espère tirer son épingle du jeu dans une ville traditionnellement à droite, pour "clore la période noire" d'une ville à l'image sinistrée.
L'ancien agent des services de renseignement Jean-Charles Marchiani a pour sa part engagé toutes ses forces et un "bon réseau de militants" dans la bataille, fort du plus de 20% des voix recueillies sous l'étiquette RPF aux dernières européennes.
Ce proche de Charles Pasqua, qui se réclame de la "droite populaire" mais que ses détracteurs accusent de ratisser le terrain de la "droite extrême", veut mener une campagne "mains propres".
En cas de triangulaire, "j'ai toutes mes chances", assure M. Marchiani. Mais sa récente audition, en qualité de témoin, dans l'enquête sur des ventes d'armes à l'Angola, n'est pas faite pour l'arranger.
Michel Pizzole, de toutes les élections depuis de nombreuses années sous les couleurs du Mouvement écologiste indépendant (MEI) d'Antoine Waechter, devrait se retrouver à nouveau dans les starting-blocks.
ORANGE (Vaucluse), 7 fév (AFP) - Les opposants au dernier maire frontiste de France Jacques Bompard se sont promis de "libérer Orange du FN" en ne présentant qu'une seule liste au second tour face à leur "ennemi commun", qui les défie avec assurance.
En mars 1995, M. Bompard ne l'avait emporté qu'avec 87 voix d'avance (35,93%) sur le maire socialiste sortant, à la faveur d'une triangulaire avec un candidat RPR. Deux mois plus tard, au premier tour de la présidentielle, Jean-Marie Le Pen récoltait 26% des voix dans la petite ville de garnison.
Cette fois, même ses détracteurs l'annoncent: "Bompard va faire un carton au premier tour. Peut-être plus de 40% des voix..."
Pour ratisser large, le maire a remisé sa casquette FN au vestiaire, tout en restant secrétaire départemental du parti. Il se décrit comme un "gestionnaire de bon sens, ni de droite ni de gauche", qui, à coups d'aménagements de voirie, "a apporté la civilisation un peu partout".
Face à lui, la droite républicaine se présente unie "pour la première fois depuis 18 ans" derrière Alain Agostini (RPR), un cadre commercial de 53 ans qui se jette pour la première fois dans la mêlée électorale.
La gauche pas tout à fait plurielle (PS-PC-MDC) est conduite par un informaticien en pré-retraite, le socialiste Claude Béroud. Après des mois de tractations houleuses avec lui, les militants Verts, PRG et régionalistes ont renoncé à prendre part au scrutin.
Des pronostics prudents
Enfin, une quatrième liste donne des sueurs froides à MM. Béroud et Agostini: celle d'"un collectif de citoyens" soucieux de restaurer la démocratie locale, conduite par une directrice de société, Anne-Marie Hautant.
Quoi qu'il arrive, les Orangeois devraient n'avoir le choix qu'entre deux bulletins le 18 mars. Gauche, droite et "citoyens" promettent "un désistement au second tour" en faveur de la liste la mieux placée pour battre le maire, voire "une mini fusion" des listes. Déjà, aux cantonales de 1998, le désistement de M. Béroud avait permis l'élection du RPR Jacques Bérard au conseil général, au détriment de M. Bompard.
L'opposition, pour autant, ne plastronne pas. "Je ne parierais pas ma chemise sur une défaite de Bompard. Cela fait peur de voir l'accueil amical que lui réservent les gens au marché", glisse un militant de gauche en catimini.
Dans le quotidien d'extrême droite Présent, M. Bompard assurait au printemps que "seul un face à face avec la droite molle pourrait rendre délicate sa réélection".
Oubliant ses harangues contre "l'immigration galopante", "les associations budgétivores" ou "les quartiers trop gâtés", le militant pur et dur de l'extrême droite ne parle que de travaux et de baisses d'impôts. Il garde le soutien du FN, et même du MNR.
VITROLLES (Bouches-du-Rhône), 7 fév (AFP) - Donné battu par deux récents sondages, le couple Mégret (MNR) jette toutes ses forces dans la bataille de Vitrolles, refusant de croire que l'extrême droite n'aurait été qu'une parenthèse.
Bouquet de roses à la main, sourire éclatant, tailleur chic ceint d'une écharpe tricolore: la maire Catherine Mégret défile entre les étals du marché comme à la parade, histoire de faire mentir sa réputation d'"Arlésienne de Vitrolles", tant ses apparitions ici sont rares selon ses opposants. La "Mégrette" préférerait la banlieue chic de Saint-Cloud, où elle réside, à la cité dortoir bétonnée du grand-Marseille, accusent ses détracteurs.
"Je veux être la femme du peuple", lance-t-elle. Aux bras de son mari Bruno, président du MNR, et entourée de force militants et gardes du corps, elle serre les mains qu'on veut bien lui tendre, esquivant les quolibets qu'elle soulève sur son passage: "On vous veut plus chez nous", lance une mère de famille.
Avec 46,7% au premier tour des municipales de 1997, Mme Mégret avait à l'époque profité des démêlés judiciaires du maire socialiste sortant Jean-Jacques Anglade. Quatre ans plus tard, la gauche a radié l'ancien maire, et Mme Mégret n'est plus créditée que de 33 à 36% par deux sondages récents réalisés auprès de 400 personnes.
"Vitrolles va être libérée le 18 mars", claironne Dominique Tichadou, tête de liste PS-Verts-PRG-MDC, donné gagnant par les deux enquêtes, même si PS et PCF n'ont pu s'entendre sur une même tête de liste.
pasionaria du MNR
M. Tichadou, conseiller général socialiste, recueillerait 25-26% au premier tour, contre 16 à 20% pour le communiste Alain Hayot, vice-président du conseil régional. La liste d'extrême gauche du conseiller municipal René Agarrat est créditée de 4%. Ces trois listes ont assuré qu'elles se désisteront pour la mieux placée au second tour. Au total, la gauche réunirait 46% au premier tour, soit neuf de plus qu'en 1997.
La droite, elle, traditionnellement minoritaire à Vitrolles, gagne six points sur les municipales de 97. "Et encore, ces résultats sont sous-estimés car les sondages ont été faits avant l'annonce du soutien du RPF de Pasqua. Et à Vitrolles, ça compte", commente le RPR Christian Rossi, tête d'une liste RPR-UDF-DL-Génération Ecologie-RPF. M. Rossi, qui veut se maintenir au second tour, assure pouvoir monter "au même niveau que M. Tichadou".
Mme Mégret affirme que ces sondages, "faussés par nos adversaires gauchistes", cachent les vraies intentions des 35.000 Vitrollais. "Ils ont peur de dire pour qui ils votent". Elle estime "fort possible" d'égaler son score de 97, assurant que le vote vitrollais est "avant tout un vote Mégret", qui ne sera donc pas minoré par la scission FN-MNR de 99.
Entre un étal de poulets
rôtis et un stand de chaussettes, la pasionaria du MNR se
découvre des airs de Jeanne d'Arc. Ceux-là mêmes
qu'elle avait pris en novembre quand elle s'était rendue
en robe de bure à l'un de ses procès: "Je suis
venue à la mairie pour rendre service à mon époux
(NDLR: déclaré inéligible) et aux Vitrollais.
Mais je me suis piquée au jeu. Je veux poursuivre mon combat
contre l'injustice. On n'est plus chez soi en France".
MARIGNANE (Bouches-du-Rhône), 7 fév (AFP) - Laissant de côté son étiquette MNR, le maire de Marignane, Daniel Simonpiéri, se présente comme "l'enfant du pays" et part favori face à une opposition à nouveau éclatée.
"Gagner dès le premier tour ? Pas impossible", avance Daniel Simonpiéri, qui l'avait emporté en 1995 à la faveur d'une triangulaire avec deux candidats de droite. Six ans plus tard, il se prévaut de son score aux cantonales de 1998 où il avait manqué de quelque 150 voix l'élection au 1er tour, devenant au second le seul conseiller général d'extrême droite dans les Bouches-du-Rhône.
Celui que ses administrés surnomment "Dany" insiste sur son enracinement: "Marignane, j'y vis depuis 40 ans". Pour rester "le maire de tous", comme il se plaît à dire, il a évité les mesures trop idéologiques, renonçant en particulier à créer la prime municipale à la naissance pour les enfants "européens", qui vaut un procès aux époux Mégret dans la commune voisine de Vitrolles.
M. Simonpiéri se targue également de fédérer le vote des rapatriés d'Algérie (8 à 10.000 des 34.000 Marignanais). Né voici 49 ans d'un père corse et d'une mère alsacienne, il dit avoir "grandi entouré de pieds-noirs" et pouvoir "raconter l'histoire de l'Algérie avec l'accent".
Cet ancien banquier se vante aussi d'avoir fait de sa ville "la moins chère de France", dans sa catégorie, pour la taxe d'habitation. Et sa priorité pour un nouveau mandat sera de diminuer la taxe foncière.
"C'est une opération promotionnelle", accuse Guy Martin (DL), 58 ans, qui conduit une liste RPR, UDF, DL, Parti Radical, Génération Ecologie. Cet ex-adjoint de l'ancien maire de droite, Laurens Deleuil, en place pendant 48 ans, avait obtenu 26% au second tour de 1995 en se maintenant dans une triangulaire suicidaire.
Un scénario qui pourrait se renouveler en mars 2001 mais dans un contexte différent: "Je ne me retirerai pas", lance Jean-Christian Tarelli, 42 ans, ex-FN, ex-MNR, ex-adjoint aux finances de M. Simonpiéri, qui a choisi de mener une liste RPF "pour dénoncer l'incompétence" du maire. L'ex-RPR Marie-Paule Bratucci, 54 ans, lui disputera également l'électorat de droite.
A gauche, le socialiste Jean-Louis
Parrenin, 57 ans, assure "avoir toutes les chances d'être
en deuxième position" derrière M. Simonpiéri,
avec une liste PS-PRG-MDC, malgré la concurrence d'une
liste Verts-PC, emmenée par l'écologiste Nadège
Audoucet, qui plaide pour "une gauche renouvelée".