Corse

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La Corse ouvre la voie aux régions

« Il n'y a pas d'exception corse » a continué de répéter le ministre de l'Intérieur. Toutes les régions françaises doivent, elles aussi, recevoir de nouvelles compétences

Une trop grande discrimination entre la Corse et les autres régions françaises ferait mauvais effet. « Tout pour l'ile...rien pour les autres » avait-on entendu dans les couloirs de l'Assemblée nationale au cours des trois jours du débat sur le nouveau statut de la Corse. N'oubliant pas les prochaines échéances électorales, le gouvernement a bien compris qu'il fallait faire un geste, même minime. Les députés examinaient hier après-midi le plan d'aménagement et de développement durable ainsi que les transferts de compétences lorsque l'opposition (l'UDF Pierre Albertini, le RPR François Fillon et les DL Nicole Ameline et Jean-Pierre Soisson) est une nouvelle fois montée au créneau stigmatisant « la myopie de l'Etat concernant l'économie des régions » et craignant « un décalage trop grand entre l'ile et les autres ». Daniel Vaillant en a profité pour annoncer de « nouvelles ambitions du gouvernement dans le domaine de la décentralisation » précisant que dans le cadre du projet de loi sur la démocratie de proximité dont la discussion pourrait venir en juin au Palais-Bourbon, de nouveaux transferts de compétences seraient accordés aux régions, sans doute par le biais d'amendements.

Les 51 articles
« Le gouvernement a engagé un travail interministériel pour réfléchir à un approfondissement de la décentralisation. On le verra bientôt avec cette loi sur la démocratie de proximité et le gouvernement acceptera des amendements inspirés du présent projet. Mais la Corse devra toujours faire l'objet de dispositions spécifiques, comme pour la langue et la loi Littoral » a déclaré le ministre de l'Intérieur.

La nuit précédente, les députés avaient adopté une nouvelle rédaction concernant la langue corse qui « est enseignée dans le cadre de l'horaire normal des écoles maternelles et élémentaires de Corse » et avait aussi autorisé l'ile à déroger à la loi Littoral. Hier, l'Assemblée a adopté la suite des 51 articles créant un nouveau statut. Transferts de compétences, notamment en matière d'environnement où grâce à des amendements des députés insulaires José Rossi et Paul Patriarche, les réserves naturelles, les créations de réserves de chasse et de faune sauvage sont du ressort de la Collectivité. Le gouvernement n'a cependant pas admis que les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse soient déterminées par les insulaires « en raison des directives européennes » a dit M. Vaillant et sans doute aussi à cause de la loi Voynet.

Un « bon travail »
Des apaisements ont été donnés aux personnels des offices et agences si ceux-ci devaient disparaitre puisque la Collectivité peut décider d'exercer les missions qui leur sont confiées. Le volet fiscal important a été adopté sans problème et là encore par le jeu des amendements Patriarche-Rossi, des facilités ont été accordées pour la sortie de la zone franche. Les deux années prévues par le projet ont été allongées à trois en matière notamment de cotisations sociales et de taxes professionnelles. Pour le retour au droit commun concernant les droits de succession, l'amendement du rapporteur prévoyant une période transitoire de douze ans a été adopté. Une vingtaine de députés siégeaient lors de cette dernière séance consacrée à la Corse, mais les nationalistes Talamoni et Quastana restaient des scrutateurs attentifs de même que Jean Baggioni dans leurs tribunes respectives. « Nous avons fait un bon travail et nous sommes restés fidèles au relevé de conclusions de Matignon » estimait Daniel Vaillant en sortant de l'hémicycle. José Rossi arborait un large sourire. Le vote solennel de la loi en première lecture a été renvoyé, comme prévu à mardi prochain. Puis le Sénat se penchera sur la question sans doute en octobre.

Nadine LEFEVRE.

Vendredi 18 Mai 2001
Tous droits réservés - © Nice-Matin

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Loi sur la Corse : la réforme sur les rails

287 voix pour, 217 voix contre : le texte gouvernemental a été adopté hier par les députés. Il permet à l'ile de Beauté de s'ouvrir de nouveaux horizons

Dans un hémicycle bien mieux garni que pour le débat de fond, la séance relative au projet de loi relatif à la Corse débute par une brève allocution de Daniel Vaillant. Le ministre de l'Intérieur revient sur tout le travail réalisé depuis plusieurs mois, un travail dont il souligne le sérieux et l'étendue.

"La République n'a rien à craindre de la reconnaissance de la spécificité corse", déclare-t-il. L'uniformité et l'immobilisme témoigneraient au contraire d'un doute dans la force de celle-ci".

Céder au chantage
Pour Daniel Vaillant, "ce projet est exigeant pour les Corses et leurs élus". En effet, en ayant la charge de mieux maitriser leur avenir, ils ne pourront pas "tenir l'Etat pour responsable de ce qui n'irait pas".

Quel meilleur exemple de cette délégation de responsabilité que le domaine de l'environnement, avec en particulier la loi littoral ? C'est ce que pense le ministre, qui souhaite que la Corse n'ait pas à expier "des fautes commises ailleurs".

Les explications de vote des porte-parole des groupes débutent avec François Fillon, pour le RPR. Si la générosité de la République envers la Corse est somme toute normale, elle n'aura d'efficacité que "si les Corses eux-mêmes décident de barrer la route aux dérives qui minent leur avenir". Car, pour le député de la Sarthe, on ne doit pas oublier la présence dans l'ile d'"une frange extrémiste qui est active ou complaisante à l'égard d'une violence dont les victimes furent souvent les Corses eux-mêmes".

Selon le RPR, le gouvernement a choisi comme interlocuteurs privilégiés les indépendantistes. En satisfaisant leurs revendications, il cède au chantage à la violence. "Il ne faut pas donner plus de crédit aux explosifs qu'aux revendications spécifiques. Le gouvernement a fait l'inverse, maximaliste en ce qui concerne la Corse, minimaliste pour les autres région", dit François Fillon, qui annonce l'opposition du RPR au projet de loi.

Le groupe communiste, par l'entremise de Michel Vaxès, est mitigé. Il ne conteste pas les pouvoirs octroyés, mais il s'interroge.

En effet, "déjà des voix s'élèvent pour en demander plus encore et font valoir une conception fédéraliste de l'Europe libérale, sans parler de certaines revendications à tonalité séparatiste". Les communistes s'abstiendront, en attendant d'avoir des garanties sur "le développement d'une démocratie citoyenne et participative" au sein de la politique de décentralisation.

Un pari à soutenir
Pour Pierre Albertini (UDF), la question est de savoir si le nouveau statut "annonce une dérive progressive vers la sécession ou un développement harmonieux dans la République". S'il y a des bonnes choses dans le projet, certaines sont plus discutables, notamment en ce qui concerne la possibilité d'adapter les lois... Le groupe UDF "votera majoritairement contre le texte".

Le groupe RCV est très divisé sur le projet. Son porte-parole, Jean Pontier, reconnait que Lionel jospin "a eu raison de choisir le dialogue". Son pari "mérite donc d'être soutenu", mais avec des nuances. Le débat sur la Corse, en particulier, occulte le débat général sur la décentralisation.

« Faire confiance aux Corses »
Le groupe DL laisse la liberté de vote à ses membres. Nicole Ameline souligne que "la bonne méthode aurait été de traiter des singularités des régions plutôt que de la spécificité corse ". De plus, " l'architecture baroque du projet le rend inopérant ". DL émet aussi des réserves sur l'enseignement de la langue corse, car " la culture ne doit pas servir au repli identitaire mais à franchir les frontières ".

Il va sans dire que le PS, par la voix de Jean-Yves Caullet, est favorable au projet. Selon lui, " les liens qui unissent la Corse à la France méritent mieux qu'une crispation sur les institutions ", et l'ile doit trouver sa place dans une République innovante. " Nous faisons confiance aux Corses. La voie du succès est étroite mais cette réussite sera la leur et celle de toute la France", conclut Jean-Yves Caullet, avant que l'on ne passe au vote.

A la majorité de 287 voix, contre 217 sur 567 votants et 504 suffrages exprimés, l'ensemble du projet est adopté.

J. R.

Mercredi 23 Mai 2001
Tous droits réservés - © Nice-Matin

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