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LA DISSERTATION PHILOSOPHIQUE |
D'abord, rappelons que si la dissertation est un texte argumentatif, elle doit avoir la structure "Introduction, développement et conclusion". Ces trois parties d'une dissertation sont expliquées dans le chapitre intitulé "La structure d'une dissertation".
Pour qu'une dissertation soit philosophique (car il existe
plusieurs niveaux d'argumentation ainsi que des dissertations reliées
à d'autres matières, par exemple le français), il
faut:
Pour qu'une dissertation soit philosophique: 1) qu'il y soit question d'idées à débattre et à argumenter; 2) que l'argumentation implique la référence à des valeurs et à des principes. |
Le premier point est évident. Arrêtons-nous
au second, qui est nouveau.
Qu'est-ce qu'une valeur?
L'une des meilleures définitions qui ait été donnée du mot valeur nous vient du sociologue québécois Guy Rocher:
"Une manière d'être ou d'agir qu'une personne ou une collectivité reconnaissent comme idéale et qui rend désirables ou estimables les êtres ou les conduites auxquels elle est attribuée. /.../ En tant qu'idéal, la valeur implique donc l'idée d'une qualité d'être ou d'agir supérieure à laquelle on aspire ou dont on s'inspire."
L'important, dans cette définition, c'est le mot "idéal": ce qui est recherché à travers une valeur, c'est un état, une réalité qui n'existe pas encore mais qui représenterait une vie idéale, quasi parfaite. Ah! Si tous les êtres humains étaient en sécurité, libres et autonomes, respectés, égaux, fraternels, créateurs et impliqués dans la vie sociale et politique! Ah! Si nous avions un monde de justice, d'égalité, de paix, d'harmonie, de beauté, d'amour, de sagesse, de bonheur et de partage! Ce serait... le paradis sur terre!
Eh! bien, les voilà, les valeurs fondamentales
auxquelles tout le monde aspire:
Quelques grandes valeurs:
La sécurité La liberté et l'autonomie Le respect L'égalité La fraternité La créativité La participation La justice |
La paix L'harmonie La beauté L'amour et l'amitié La sagesse Le bonheur Le partage |
C'est précisément au nom de ces valeurs,
ou de l'une d'entre elles, ou de quelques-unes d'entre elles, que l'on
se prononce sur des questions majeures tournant toutes, finalement, autour
du sens de la vie, et que nous développons notre propre philosophie,
c'est-à-dire notre propre conception de la vie, du monde ou de tel
sujet à débat.
Attention! Ne pas confondre!
À noter qu'il y a bien d'autres valeurs encore, mais la liste donnée ici est suffisante, je crois, pour faire comprendre ce qu'est une valeur. Notons, cependant, que la définition de Guy Rocher prête quelque peu à confusion. Elle est tellement large que la catégorie "valeurs" peut devenir un fourre-tout dans lequel on met un peu n'importe quoi. C'est la raison pour laquelle il n'est pas inutile de distinguer ce qui est une valeur et ce qui a de la valeur. Une valeur est toujours une fin en soi, elle est recherchée pour elle-même et non pas en vue d'autre chose. Ce qui a une valeur, par contre, vaut quelque chose, a une certaine importance, mais n'est pas nécessairement une fin en soi (par exemple, un beau crayon ou une précieuse bague de fiançailles).
Selon la définition de Rocher, les vertus ou qualités morales (endurance, courage, discipline, écoute...), les sentiments moraux (sympathie...), les attitudes morales (sens du devoir, héroïsme, honnêteté, probité, altruisme, gentillesse, etc) et les facultés (intelligence, volonté, sensibilité) seraient à inclure dans la catégorie "valeurs". Cependant, il faut les en distinguer car tout cela ne consiste pas en une fin en soi mais en des moyens pour réaliser des valeurs.
Notons, enfin, que des institutions comme l'école, l'Église, l'État, la famille, les hôpitaux, etc., ne sont pas des valeurs mais bel et bien des institutions. Les domaines d'activité comme le travail, le loisir, l'art, le sport, la science, la philosophie, la morale, la politique, la religion ne sont pas davantage des valeurs, mais bien des moyens en vue de réaliser des valeurs: la créativité dans le travail et les loisirs, le dépassement de soi dans le sport, la vérité dans la science et la philosophie, la beauté et la créativité dans l'art, le bien dans la morale... Donc, ne pas les confondre avec des valeurs.
Qu'est-ce qu'un principe?
Un principe est une règle d'action qui s'appuie
sur un jugement de valeur et constitue un modèle, une règle
ou un but. Un principe est en quelque sorte une loi ou une norme qui commande
et dirige tous nos actes en vue de promouvoir une action valable et jugée
digne de tout être humain. Voici quelques exemples de principes:
Quelques exemples de principes: "Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse." "Il ne faut jamais répondre à une injustice par une injustice." "Mieux vaut la mort plutôt que l'esclavage." |
Lorsqu'on porte un jugement, en philosophie, on peut aussi
faire appel à des principes de ce genre et les associer à
nos valeurs.
Points à surveiller pour s'assurer qu'on est au
niveau philosophique:
1) La question posée doit elle-même avoir une dimension philosophique.
Toute question n'est pas de niveau philosophique. Il faut donc s'assurer qu'elle le soit, surtout si on vous demande d'écrire sur un sujet sans poser de question, ou si on vous demande simplement si vous êtes d'accord ou non, pour ou contre quelque chose.
Comment s'assurer que la question est philosophique? Déterminons-le
en examinant les différents types de questions.
Les sortes de questions:
Les questions de définition |
On a affaire à une simple question de définition
lorsqu'on cherche à savoir le sens, la signification d'un mot.
Exemples:
Qu'est-ce que la justice?
Qu'est-ce que l'euthanasie?
Il n'y a rien de philosophique dans une question de définition. Il s'agit simplement d'une précision sur le sens d'un mot ou d'une expression qu'on utilise.
On a affaire à une question de fait lorsqu'on
cherche des faits réels, des informations sur ce qui existe, ce
qui se dit, ce qui se pense, ce qui se fait, faits et informations qui
sont vérifiables et qu'on ne peut remettre en question.
Exemples:
Combien y a-t-il d'avortements par année au Québec?
Quand a commencé la philosophie occidentale, et où?
Les questions de fait n'ont rien de philosophique. Il s'agit simplement de faits.
On a affaire à une question de jugement ou de valeur
lorsqu'il nous faut porter un jugement, la plupart du temps moral, sur
un sujet. Elles exigent une réflexion et demandent une estimation,
une évaluation, une appréciation de notre part.
Exemples:
Les prisonniers sont-ils trop bien traités?
Est-ce que tout acte est excusable?
Qui, de Méryl Streep ou de Madonna, est la meilleure actrice?
Quelle tenue vestimentaire est la plus appropriée pour cette soirée?
Les questions de jugement ou de valeur peuvent être
philosophiques, mais ne le sont pas toujours. Dans les quatre exemples
mentionnés, les deux derniers n'ont aucune dimension philosophique;
le premier pourrait être philosophique si, dans l'explication de
la réponse, on faisait référence à des valeurs
ou à des principes d'ordre moral. Quant au deuxième exemple,
c'est le plus philosophique des quatre car répondre à cette
question exige obligatoirement la référence à des
valeurs et à des principes.
On a affaire à des questions de droit lorsqu'elles exigent
une référence à des principes et à des normes,
et la promotion de certaines valeurs jugées fondamentales et essentielles.
"C'est une question de principe." Les questions de droit traitent
de la légitimité morale, juridique ou logique de quelque
chose. Elles traitent essentiellement de ce qui doit être,
et non de ce qui est.
Ex:emples:
Doit-on répondre à la violence par la violence?
Devrait-on avoir le droit de tuer quelqu'un qui a tué?
Au nom de quoi interdire l'euthanasie?
Remarquez le début de chacune de ces questions: le verbe "devoir", à l'indicatif présent ou au conditionnel, et l'expression "au nom de quoi".
"Au nom de quoi" exige la référence à des valeurs, par exemple: au nom de la liberté, du respect de la vie, de l'égalité, de la justice, du progrès... Une question commençant ainsi est alors toujours philosophique.
L'utilisation du verbe "devoir" ne signifie cependant pas automatiquement que nous avons affaire à une question philosophique. Prenons la question suivante:
"Doit-on penser que le mot "philosophie" est payant au Scrabble?"
Pour répondre à cette question, on calcule
et le tour est joué! Pas besoin de référer à
des valeurs ou à des principes! Il ne s'agit donc pas d'une question
philosophique.
N.B.:
Toute question de droit est aussi une question de jugement ou de valeur, mais toute question de jugement ou de valeur n'est pas une question de droit. |
Cela dit, précisons que:
. Une question philosophique doit porter sur le sens et
les valeurs, ou le sens de l'existence humaine.
. Elle doit avoir une portée universelle et objective.
. Elle doit viser ce qui devrait être (le mieux, le meilleur).
. Elle doit porter sur des enjeux (ex: l'avenir, la qualité de vie,
la justice, la liberté, la paix, etc.)
. Elle doit porter sur un problème humain fondamental, sur la société
(ou un de ses aspects), afin de mieux orienter l'action individuelle et
collective.
2) La thèse doit comporter une dimension philosophique.
Il y faut donc la référence à des
valeurs ou à des principes.
3) L'argumentation doit contenir des arguments d'ordre philosophique.
Dans le développement qui constitue l'argumentation,
il doit aussi y avoir référence à des valeurs et à
des principes, ce qui n'exclut pas l'utilisation d'arguments d'un autre
niveau, par exemple, économique, sociologique, politique ou scientifique.
Cependant, ces types d'arguments doivent nous ramener, en bout de ligne,
aux valeurs et/ou principes mis de l'avant.
Exemple d'un argument non philosophique: On devrait rétablir la peine de mort car entretenir la vie d'un meurtrier coûte trop cher à la société (on parle de 50,000$ à 70,000$/ an). |
Ceci est un argument strictement économique,
tel que formulé. Pour qu'il soit vraiment philosophique, il faudrait
démontrer que les économies ainsi réalisées
sont plus importantes qu'une vie humaine. C'est là tout un choix
de valeurs à justifier! Surtout si l'on songe à des cas analogues
qui, eux aussi, coûtent cher à la société: les
malades chroniques, les aliénés mentaux et, pourquoi pas,
les gens qui vivent du bien-être social!
Ce choix devrait aussi lui-même être expliqué et justifié par quelque chose d'autre, un principe par exemple, du style: "Qui est responsable de la conditon dans laquelle il se trouve mérite d'en subir toutes les conséquences." - Autre démonstration quelque peu ardue! Cela oblige presque à du cas par cas:
Tout meurtrier est-il vraiment responsable de son acte?
Que faire avec les malades chroniques ou les grands handicapés qui
ont eux-mêmes causé leur état par ivresse au volant
ou excès de vitesse, par imprudence notoire ou par tabagisme??
Quelqu'un qui, partant de l'argument économique
formulé, expliquerait tout cela, aurait alors un traitement philosophique.
Mais à cette seule condition.
Autre exemple d'un argument non philosophique: L'avortement est un crime car seul Dieu est maître de la vie et de la mort. |
Voilà un argument d'ordre religieux et non philosophique,
cela va de soi.
Illustrons maintenant ces trois points à surveiller par des exemples de textes argumentatifs. En les examinant de plus près, nous allons déterminer s'ils sont de niveau philosophique ou non.
Exemple # 1
POUR LA LÉGALISATION DE LA DROGUE Dans les écoles, les rues et même les bars, nous voyons autour de nous circuler toutes sortes de choses. Une de celles-ci, que l'on voit de plus en plus, est la drogue. Devrions-nous la légaliser au même titre que l'alcool et les cigarettes qui sont, eux aussi, une sorte de drogue? Selon moi, légaliser la drogue n'est certes pas la meilleure solution, mais c'est quand même une chose que le gouvernement devrait tenter. Dans ce travail, je ferai valoir que si la drogue devenait légale, il y aurait moins de jeunes qui en prendraient, que l'on pourrait prévenir ce qu'on appelle les "overdoses" et, pour terminer, que ce changement n'influencerait pas ceux qui n'en veulent pas. Je crois, en effet, que si la drogue devenait légale, il y aurait beaucoup moins de jeunes qui en consommeraient. On dit que la plupart des jeunes sont attirés par ce qui n'est pas bien, ce qui n'est pas légal. Plusieurs jeunes vont vers la drogue parce qu'ils sont frustrés de la situation dans laquelle ils se trouvent. Ils veulent déplaire à la société et aux gens qui les entourent pour que ceux-ci voient qu'ils existent, pour qu'ils s'occupent plus d'eux, car ils se sentent délaissés. En légalisant la drogue, les jeunes ne pourraient plus en prendre seulement pour mal faire ou pour déplaire, puisqu'elle serait maintenant légale. Un autre avantage de la légalisation serait que l'on pourrait prévenir certaines "overdoses" ainsi que diminuer le taux de mortalité dû à l'ingestion de drogue de contrebande dangereuse pour la santé des consommateurs. En effet, en appliquant cette nouvelle législation, le gouvernement aurait le pouvoir de fournir aux consommateurs des produits de meilleure qualité et sans conséquences sur la vie de celui ou celle qui en prend en quantité raisonnable. De cette façon, les "overdoses" dues à l'ingestion de mauvaises drogues seraient donc moins fréquentes. Songeons aussi que la légalisation des drogues n'aurait pas d'influence sur les gens qui n'en voulaient pas auparavant. Je crois bien que si une personne n'était pas intéressée à ce genre de substance avant sa légalisation, elle ne le serait pas davantage après. De toute façon, de nos jours, il est facile de se procurer de la drogue même si elle n'est pas légale. Donc, si une personne ne voulait pas de drogue avant, elle n'en voudra pas après, étant donné qu'elle n'était pas intéressée. En conclusion, la légalisation de la drogue mérite d'être mise à l'essai car, selon moi, les personnes qui en prennent pour faire le mal ne le feraient plus, certains cas de décès pourraient être prévenus grâce au contrôle du gouvernement et, finalement, la légalisation de la drogue n'aurait pas d'effet sur les personnes qui n'en prenaient pas auparavant. |
Commentaire
La thèse elle-même (la légalisation est quelque chose qu'on devrait tenter, même si ce n'est pas la meilleure solution) n'a rien de philosophique, telle que formulée: elle ne contient aucune référence à une valeur ou à un principe.
Les trois arguments utilisés n'ont pas davantage de dimension philosophique. Ils sont d'ordre strictement utilitaire, axés sur les résultats escomptés.
L'explication du premier est d'ordre psychologique (pourquoi les jeunes sont attirés par la drogue).
L'explication du deuxième est d'ordre médical mais a une petite allure philosophique parce qu'elle fait référence à la valeur "santé" et à la notion de qualité des produits ingérés. Mais avouons que tel que présenté, c'est bien mince et notons, au passage, que le mot "overdose" est inapproprié. L'ingestion de mauvaises drogues mène à un "bad trip" et non à une "overdose", laquelle signifie surdose, en français, c'est-à-dire qu'on en a trop pris.
L'explication du troisième est encore d'ordre psychologique (quand on ne veut pas de quelque chose, légal ou pas, on n'en veut pas).
Exemple # 2
Contre la légalisation de la drogue Dans le dictionnaire, au mot "drogue", on retrouve entre autres la différence entre drogue dure (héroïne, cocaïne, LSD), qui engendre rapidement une dépendance physique, et drogue douce (marijuana, haschich), n'entraînant pas nécessairement de dépendance physique. En ce qui me concerne, je suis contre la légalisation de toute drogue pour les effets nocifs qu'elle a sur la santé mentale et physique de l'individu et pour les enjeux collectifs que représenterait une telle législation sur la société. Au niveau des répercussions sur la santé physique, une drogue, de par sa nature, n'a rien en soi qui puisse en justifier un usage libre et quotidien. En ce qui concerne les drogues douces, les effets tels que perte de mémoire, mauvaise concentration et baisse de l'appétit ne sont que quelques exemples de ces méfaits facilement observables. Pire encore, lorsqu'on parle de drogues dures, elles affectent, sans contredit, la santé physique de ses consommateurs en allant même jusquÕà détruire des cellules du cerveau et ce, sans compter la dépendance physique qu'elles entraînent. Comment, alors, prôner et favoriser l'usage d'un produit si dommageable pour la santé? L'effet psychologique de la drogue sur un individu en est un autre qui devrait contribuer à éliminer l'usage des drogues. La dépendance physique entraîne automatiquement le consommateur dans un état fébrile au niveau psychologique. La drogue, tout comme l'alcool, place l'individu dans un perpétuel conflit de consommation et de non-consommation. Tout comme l'alcoolique, la personne aux prises avec cette dépendance refuse souvent l'évidence de la domination de la drogue sur elle. Le plaisir simple de vivre et de bien fonctionner à travers la réalité quotidienne devient morne et insensé aux yeux de celui qui cherche des artifices continuels dans la consommation de drogues. C'est la même chose pour celui qui, au lieu de faire face à la vie, trouve un refuge dans une consommation régulière, refuge bien illusoire qui se referme tranquillement sur lui aux dépens de sa force mentale et morale. Ainsi donc, à mon sens, accepter la drogue dans une société au même titre qu'un produit de consommation courante, même si elle est réglementée, est inacceptable pour les effets qu'elle a sur l'individu dépendant. Ce l'est encore davantage si on tient compte des enjeux collectifs de cette légalisation. Moins la drogue sera contestée, plus elle sera utilisée par un plus grand nombre de gens. Or, par le fait même, une société tolérante et permissive risque fort de se laisser dépasser et de se retrouver avec un problème beaucoup plus grave que celui qu'elle a tenté de résoudre par une légalisation. Toute société qui repose sur l'idéal d'un mieux-être ne peut se porter à la défense d'une substance qui détruit à petit feu la salubrité de cette société et celle des individus qui la composent. Il ne faut pas oublier, de plus, que la drogue est intimement reliée au milieu du crime, de la prostitution, de la violence et de la délinquance. Une société saine, ou qui se veut telle, ne peut donc faire la promotion d'un tel produit. L'atteinte à la santé physique et mentale, ainsi que les enjeux sur la collectivité, ne sont qu'un bref aperçu des dégâts engendrés par la drogue. Cette prédisposition à vouloir consommer plus jeune, plus librement, plus facilement, ne devrait en aucun cas être à l'origine d'une légalisation (le principe de l'offre et de la demande). Cette tendance doit plutôt supposer une réflexion personnelle reliée à une réflexion collective car la consommation de drogue est, en fait, un cri d'alarme. |
Commentaire
Ce texte est davantage philosophique que le précédent. Déjà, dans l'introduction, la valeur santé, physique et mentale, est mise de l'avant, de même que le mieux-être individuel et social. Dans le développement, au troisième paragraphe du texte, on invoque implicitement une troisième valeur, celle de l'indépendance, de l'autonomie, de la liberté. Implicitement seulement car ces mots ne figurent pas dans le texte, on les dégage par opposition à la dépendance et à la domination dont il y est question. A la toute fin du paragraphe, une quatrième valeur apparaît: la force mentale. Quel dommage que ces valeurs n'aient été que mentionnées! Le traitement aurait alors été vraiment philosophique, si tout cela avait été mis clairement de l'avant et expliqué.
Regardons maintenant du côté des principes. Y en a-t-il dans ce texte? Si oui, il faut les chercher! En se forçant, on pourrait trouver les suivants:
. On ne peut rendre légal ce qui est nuisible et
dangereux pour les individus et la société.
. Il faut toujours viser le mieux-être.
. On ne peut favoriser ce qui rend dépendant.
. Mieux vaut vivre de façon lucide et "straight" que "gelé"
dans des refuges artificiels.
. Mieux vaut prévenir que guérir!
Sauf que le lecteur ou la lectrice ne doit pas se forcer pour dégager la dimension philosophique d'un texte; celle-ci doit être clairement exprimée.
EN VACANCES, ON NE TRAVAILLE PAS! Cet été, me prélassant au soleil et me laissant couler la vie douce pendant mes vacances que je jugeais bien méritées, je voyais mon voisin faire des rénovations à son chalet. Une idée m'est alors tout de suite venue à l'esprit: "Les vacances, ce n'est pas fait pour travailler, mais pour se reposer!" Un peu plus tard, réfléchissant de plus près à cette idée, je me suis dit qu'il y aurait sans doute des nuances à y apporter. Que les vacances ne soient pas faites pour travailler, soit; mais ont-elles simplement pour but de se reposer? Certainement pas. Pour le démontrer, nous allons d'abord voir le cas de ceux et celles qui travaillent pendant leurs vacances et qui, de ce fait, mettent malheureusement une croix dessus; nous traiterons ensuite de la fonction "repos" des vacances, pour montrer que celles-ci comprennent bien d'autres choses de plus important encore, et qui constituent le vrai sens des vacances. I. LE CAS DE CEUX ET CELLES QUI TRAVAILLENT PENDANT LEURS VACANCES Même si le mot "vacances" signifie cessation du travail ou de l'emploi exercé, période de liberté où l'on peut enfin faire ce qu'on a vraiment envie de faire, bon nombre de personnes vont plutôt continuer à travailler. C'est le cas, en particulier, de la majorité des étudiants qui, pour payer leurs études, ont besoin d'argent. Cet argent, ils le ramassent précisément pendant leur période de vacances estivales et, dans bien des cas, ils continuent, pendant l'année scolaire, à exercer un emploi à temps partiel. Outre les étudiants, il peut aussi y avoir des gens qui "choisissent" de continuer à travailler pendant leurs vacances, comme certains profs, en particulier, qui donnent des cours d'été ou, du moins, pendant une partie de leurs vacances. Or, est-ce là un véritable choix? Pas vraiment; ce serait même plutôt le contraire. On risque fort d'entendre, comme raison du travail pendant les vacances, un "Mais je n'avais pas le choix! J'ai trop besoin d'argent!" Il semble alors certain que le manque d'argent est un obstacle à la réelle prise de vacances. En réalité, ce ne sont plus, ce ne sont pas des vacances que celles que l'on passe à travailler pour gagner de l'argent. D'ailleurs, une personne dans cette situation pourrait fort bien dire, avec justesse: "Je n'ai pas pris de vacances, je n'ai pas vu mes vacances!", et elle ne peut sûrement pas être placée dans le groupe des "vacanciers"! En effet, elle continuait sa vie de travail, et celle-ci est un moment différent de celui des vacances. C'est bien ce que nous indique la définition même du mot "vacances". II. LES VACANCES, POUR SE REPOSER? Que les vacances ne soient pas du tout faites pour travailler, cela nous semble l'évidence même. Mais si elles ne sont pas faites pour travailler, pourquoi donc existent-elles? Quelle est la véritable fonction, le vrai but des vacances? Serait-ce, comme le dit l'idée que nous examinons, de se reposer? Ici, c'est plus délicat. À notre avis, les vacances peuvent servir en partie à cela, mais le repos ne doit pas être le seul but ou la seule fonction des vacances. Examinons d'abord le sens même du repos. Selon le petit Robert, se reposer est synonyme de se délasser et ce, par l'arrêt d'une activité ou par un changement d'activité. Évidemment, selon ce sens, si la fonction des vacances est de se reposer, il n'est donc pas question d'y poursuivre le même travail ou le même emploi! Le petit Robert précise aussi que se reposer signifie cesser de se livrer à une activité fatigante ou pénible, de façon à faire disparaître la fatigue. Les activiés fatigantes seraient donc à exclure pendant la période des vacances. Enfin, se reposer, nous apprend ce même dictionnaire, signifie aussi être ou vivre dans l'inaction. Compte tenu de ces différentes significations possibles du repos, il nous semble logique de penser que les vacances comportent une nécessité de délassement et de changement d'activité. Il y faut prendre une pause, faire autre chose, se délasser, se déstresser, refaire ses énergies ou "refaire le plein", comme on dit, se récréer et, pourquoi pas, se re-créer! Ce repos et ce délassement nous sont nécessaires pour refaire nos forces et être frais et dispos lorsque nous revenons au travail. Cependant, nous nous devons d'insister sur le fait que lorsque nous parlons de repos, il ne s'agit pas de vivre dans l'inaction, de ne rien faire; c'est là un sens qui convient à la personne qui fait une sieste ou qui dort, mais pas pour une personne en vacances. Dans ce dernier cas, nous parlons bel et bien d'un changement d'activité et non d'inactivité. III. QUE SONT OU DEVRAIENT ÊTRE LES ACTIVITÉS DE VACANCES? À QUOI SERVENT-ELLES? Les vacances étant une période de congé et de loisirs, une période de temps pendant lequel on peut vraiment choisir nos activités, celles-ci doivent, ou devraient être axées sur nos libres choix, sur nos aspirations les plus profondes et nos désirs les plus chers. Évidemment, là-dessus, les tendances divergent selon les individus et, sans doute, selon le niveau de culture et l'épaisseur du portefeuille! Quoi qu'il en soit, un vacancier doit s'orienter vers des activités de loisir. Il peut s'agir d'un voyage, solution que bien des gens et des familles choisissent. Ça dépayse, ça fait voir du nouveau, ça instruit agréablement et ça ouvre l'esprit, sans compter les personnes nouvelles qu'on peut rencontrer et les nouveaux amis qu'on peut s'y faire. Ça peut aussi être "la vie de chalet", pour ceux qui en ont un. Encore là, il y a dépaysement, changement d'air, vie différente, dans la nature, près de l'eau, au soleil - quand il fait beau et chaud! On peut tout aussi bien aller au théâtre, au cinéma, faire des randonnées, s'adonner à un sport quelconque, lire, sortir, visiter de nouveaux coins, et j'en passe. On peut même aussi s'adonner, si le coeur nous en dit, à une activité qui peut être considérée comme un travail, par exemple cultiver un jardin ou construire quelque chose sur son terrain, pourquoi pas? Toutes ces activités librement choisies, sans caractère de nécessité ou d'obligation comme le sont les activités de travail, nous apportent, en réalité, un degré de satisfaction généralement beaucoup plus intense que notre emploi. Déjà, le simple fait de travailler pour soi, "à son compte", être son propre maître, de la conception à la réalisation, apporte davantage. C'est justement là le sens même des vacances: faire ce qu'on a envie de faire, réaliser ses désirs, être créatif dans ce qui nous plaît et nous convient, bref, vivre sa liberté! Conclusion Même si, comme nous l'avons vu, les vacances ne sont sûrement pas faites pour continuer à travailler mais bien pour changer d'air, pour se délasser et pour réaliser ce que nous voulons vraiment faire et être, cela ne veut pas dire qu'il faut s'interdire, pour autant, toute activité qui s'appelle travail. Il est bien certain, de toute façon, que les travaux ménagers demeurent une exigence et une nécessité quotidiennes qui ne peuvent être exclus de la période des vacances. Rien, non plus, n'empêche quelqu'un de réaliser des travaux de construction si le coeur lui en dit et ce, non pas parce qu'il y est obligé, mais parce qu'il le veut bien. Alors, ne soyons pas trop sévères si nous voyons quelqu'un bâtir une rallonge à son chalet ou en changer la toiture! Il profite de son loisir pour réaliser ce qu'il ne peut faire pendant son temps de travail! Qui pourrait l'en blâmer, puisqu'il fait ce qu'il a librement choisi et décidé? |
Commentaire
La question de ce travail était: Commentez la phrase suivante: "Les vacances, ce n'est pas fait pour travailler mais pour se reposer!" C'est le sujet que j'avais choisi pour mes élèves de Philo 103 au tout début de la session A 96, pour vérifier leur niveau de maîtrise du texte argumentatif, maîtrise sensée être acquise à la fin du secondaire. La grande majorité s'en est tenue à l'idée suivante: quand on est étudiant, on a besoin de travailler pendant nos vacances pour se ramasser de l'argent. Voilà une idée qui n'a absolument rien de philosophique. Le sujet a été traité de façon strictement utilitaire et on a même oublié complètement le sens du mot "vacances": pratiquement personne n'a songé à en préciser la définition! De plus, on s'est limité à une catégorie de personnes, celle dont on fait partie, les jeunes aux études. Or, un traitement philosophique doit être général et global, s'appliquer à tout le monde.
Il était sans doute normal qu'il en soit ainsi puisque la philosophie n'est pas enseignée au niveau secondaire. Concentrons-nous maintenant sur le texte 3 pour voir s'il est vraiment philosophique, celui-là.
Dans la première partie, la signification du mot "vacances" est tout de suite donnée pour éliminer des "vacanciers" tous ceux et celles qui travaillent pour gagner de l'argent. Ce n'est pas, à proprement parler, philosophique, mais c'est là une étape nécessaire pour dégager le vrai sens des vacances, but même de ce travail. Or, déterminer le sens d'une réalité quelconque, c'est philosopher!
Dans la deuxième partie, il est question de la véritable fonction, du vrai but des vacances. Là encore, puisque c'est rechercher le sens, c'est d'ordre philosophique. Or, ce but, pour les vacances comme pour bien d'autres domaines d'activité, se trouve dans la recherche de l'obtention de certaines valeurs. Lesquelles? Toute cette deuxième partie a pour but de montrer que le repos peut en être une, mais que ce n'est pas la valeur essentielle à rechercher.
La troisième partie nous fournit la réponse. Par le biais de la question: "Que devraient être les activités de vacances?", les véritables valeurs à rechercher pendant ce temps privilégié, comme dans les loisirs, d'ailleurs, seront précisées: la liberté, l'ouverture d'esprit, les amitiés nouvelles, la satisfaction personnelle, la maîtrise de soi et la créativité.
Détermination du sens? Dimension philosophique!
Référence à des valeurs?
Dimension philosophique!
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