"- Il était temps que nous rentrions, tu as vu ce qui tombe ? Demande la jeune fille à son compagnon." Mais seul le silence lui répond.
"- Tu mécoutes ?"
Arrêtant de regarder par la fenêtre, elle se dirige dans la cuisine, où son époux est censé préparer le souper. Arrivée dans lembrasure de la porte, elle se fixe. Sa si belle cuisine est transformée en vrai souk. Sa vaisselle en porcelaine reposant sur le sol en mille morceaux, les placards défoncés, et une étrange substance vert-bleu étalée un peu partout dans la pièce. Au milieu du bazar, Eginhard, son doux et tendre, immobile, regardant fixement ce quil tient en main. Il semble captivé par le bout de papier quil tient devant les yeux.
Alors que Gaëlle emplit ses poumons pour crier son indignation face au bordel mis par son homme dans SA cuisine, limpensable se produisit. Elle vit une main sortir du papier, prendre Eginhard par le bras et le tirer vers lui. Ce qui suivit fut contraire à toutes les lois naturelles, dépassa les idées les plus fantasques des réalisateurs de S-F, et la raison féminine de Gaëlle. Aussi, lorsque Eginhard disparu dans son papier, absorbé par lui, sans même un petit « pop » pour faire plus commun, Gaëlle décida-t-elle de sévanouir dans un grand « boum ».
Lorsquelle reprend ses esprits, elle se retrouve allongée et dévêtue dans son lit. Souriant, elle se détendit, se fustigeant de faire des rêves par si idiots. Où avait-elle bien pu pêcher une idée comme ça ? Son petit mari avalé par un papier, cétait du jamais vu. Il faudrait quelle en parle à son ami Zéla, peut-être quil pourrait en faire une chouette histoire, qui sait ?
Après un regard furtif sur le radioréveil, elle se figea. 15 h 08 ! Que pouvait-elle faire au lit à pareille heure ? Que faisait Eginhard ? Pourquoi ne lavait-il pas réveillée ?
Un frisson lui parcouru léchine, et dun bond, elle fut debout. Son drap de lit couvrant sa nudité, elle sortit de la chambre, traversa en trombe le salon, pour atteindre la cuisine. Immobile, elle regarde son domaine en parfait état. Nulle trace des événements farfelus de son rêve, il doit donc sêtre passé autre chose qui fait quelle ait tant dormi. Et où était Eginhard ?
"- Hum, hum ... Excusez-moi de vous déranger, mais je ..."
Sursautant en entendant cette voix inconnue chez elle, alors quelle était
à peine vêtue, Gaëlle se mit à crier par réflexe.
Elle fit alors face à lhomme se trouvant devant elle. Il était
habillé avec des vêtements appartenant à Eginhard,
quil avait quelque peu forcé pour y caser son imposante carrure.
Son visage, beau au demeurant, était marqué par une cicatrice
récente, et par une barbe de 2 jours. Ses cheveux coupés
courts navaient pas dû être brossés depuis plusieurs
jours.
- Arrêtez de hurler, je vous prie, cela me donne mal à la tête. Je ne vous veux pas le moindre mal, jai juste quelques questions à vous poser.
- Qui êtes-vous et que faites-vous chez moi ? Et où est Eginhard ? Questionna Gaëlle, proche de lhystérie.
- On mappelle Liam et je suis désolé davoir fait irruption chez vous. Jaurais déjà dû repartir, mais jai perdu une de mes cartes, et il me faut la retrouver avant de men aller. Quand à cet Eginhard, je ne sais où il se trouve.
"- Une carte ? Quel genre de carte ? De téléphone,
de crédit, ..."
"- Non, une carte de ce style, dit Liam tout en sortant un paquet
de sa poche."
Il en enlève une du tas et la tend à Gaëlle, qui sen saisit avant de sévanouir derechef.
Lorsquelle revient à elle, Liam se trouve à ses côtés, rebouchant prestement une fiole translucide, quil remet en poche.
"- A votre réaction, il me semble que vous avez vu ma carte,
nest-ce pas ?"
Les yeux dans le vide, Gaëlle lui répond comme un automate.
"- Oui, elle a avalé Eginhard dans la cuisine."
"- Comment ça, avalée, questionne Liam nosant comprendre."
"- Un bras est sortit de la carte, a pris Eginhard et la tiré
à travers la carte."
Se relevant dun coup, Liam semble soudainement énervé.
"- Cest impossible, tu as dû te tromper. Il ne se peut quun
contact datout ait pu être réalisé avec lui, surtout
venant dun étranger."
Liam prit Gaëlle par les épaules et commença à
la secouer comme un prunier.
"- Quas-tu vue réellement ? Parle donc, cria-t-il.
Le regard de Liam plonga alors dans les yeux de Gaëlle, et il ny
vit que la peur. Lentement, les yeux de la femme sembrumèrent,
avant dêtre inondés par un torrent de larmes. Reprenant ses
esprits, Liam se rendit compte quelle ne lui mentait pas, elle nen avait
pas la force. Ce nétait quune pauvre petite apeurée face
à tant de mystères.
Liam lui prit sa tête dans ses mains, caressant ses boucles dor, avant de la calmer par sa seule volonté. Le visage de Gaëlle se radoucit, prit un air de paix intérieure, et elle sombra dans un sommeil réparateur.
Après avoir mis Gaëlle au lit, Liam se retrouva seul dans lobscurité de lappartement. Il porta la main à son épaule avec une grimace de douleur. Il se mit en devoir de changer son pansement. Son combat avec le chien de Tindalos avait faillit lui coûter la vie. Ces bestioles sont des plus coriaces, et même une descente aux enfers ne lui avait permis de lâcher le dernier des monstres. Quand le chien finit par latteindre, il bondit sur lui, arrachant une partie de son épaule et stoppant brusquement la descente. Il sétait retrouvé dans une cuisine, encastré dans une armoire, la bête à terre dans un amoncellement de porcelaine. Elle se relevait déjà, prête à se ruer sur sa proie pour lachever. Liam attrapa ce qui était proche pour se défendre, et mit la main sur un couteau électrique. Esquivant la charge du monstre, Liam lui bloqua la tête dans le meuble où il sétait fourré. Enclenchant son appareil, il commença à attaquer la chair. Le chien émit un hurlement affreux et se débattit du mieux quil pouvait, sans succès. Le sang de la bestiole vola à travers la cuisine, aspergeant meubles, sol et plafond dune substance vert-bleu. Lorsque lanimal eut rendu lâme, Liam sécroula, perclus de douleur. Il ne remarqua pas que son paquet datouts avait glissé de sa ceinture pendant la bataille.
A son réveil, il avait trouvé Gaëlle évanouie et sen était occupé, avant de remettre la cuisine en état, et jeter le cadavre à la poubelle. Cest lors de ce rangement quil trouva ses atouts éparpillés sur le sol. Il avait ramassé ceux-ci et vérifié quaucun ne manquait. Un seul dentre-eux ne répondait pas à lappel. Mais il est impossible quun contact ait été conclut avec le personnage représenté. Il y avait déjà de nombreuses années que Dworkin avait disparu dAmbre...
Extrait de: Les légendes vivent.